Le véritable changement de paradigme (profond) dont nous avons besoin

« Le véritable changement de paradigme dont nous avons besoin est une évolution profonde de nos cultures, de nos manières d’être, une évolution qui est par essence spirituelle.”  

Alors que nous prenons peu à peu conscience de la nature systémique de nos problèmes, le besoin de changer de paradigme est maintenant sur toutes les lèvres. Je trouve souvent cette phrase d’Albert Einstein dans les rapports sur la crise environnementale et climatique que je consulte dans le cadre de mon travail : « Un problème ne peut être résolu en réfléchissant de la même manière qu’il a été créé. » Ironiquement, les solutions (« nouveaux paradigmes ») les plus souvent proposées dans ces mêmes rapports s’écartent si peu de notre paradigme de développement actuel qu’elles sont vouées à l’échec, comme l’avertissait le grand physicien. Le Fonds vert pour le climat, principal dispositif financier des Nations unies dédié au changement climatique, cherche à promouvoir « un changement de paradigme vers un développement à faibles émissions et résilient pour le climat ». Mais il ne remet pas en question notre système culturel d’exploitation fondé sur l’idée de séparation. En théorie, ce système pourrait très bien se maintenir dans un monde à faibles émissions de carbone et continuer à semer le malheur.

En fait, j’ai souvent l’impression qu’à travers les demi-solutions proposées, on tente d’éviter le véritable changement de paradigme dont nous avons besoin : « Il faut que tout change pour que rien ne change. » [1]. La relative confusion qui règne autour des paradigmes tient aussi à la pluralité de définitions associées à ce concept : (i) exemple ou archétype ; (ii) cadre philosophique ou théorique qui détermine ce qui peut être considéré comme valide d’un point de vue scientifique ; ou encore (iii) cadre culturel qui façonne nos perceptions.

Le véritable changement de paradigme dont nous avons besoin n’a pas seulement à voir avec de nouveaux modèles ou de nouvelles idées, mais il s’agit fondamentalement d’une évolution profonde de nos cultures, de nos manières d’être. Cette évolution est par essence spirituelle : elle concerne le sens et les priorités mêmes de notre existence, ce qui devrait se traduire par la reconnaissance de l' »être » (devenir ce que nous sommes, le meilleur de nous-mêmes) au lieu de l' »avoir » comme notre principal objectif collectif. Pourquoi ne pas aller au fond des choses et reconnaître que ce nouveau paradigme, dont découlent les autres changements, doit être avant tout spirituel ?

Mon livre « Politique de l’Etre » propose de reconnaître la direction fondamentale de ce changement, de définir un cap et de discuter de la manière dont nous pouvons aller de l’avant avec toutes les idées et solutions pertinentes. Celles que j’ai identifiées proviennent souvent de domaines de pensée qui ont eux-mêmes des prétentions paradigmatiques, comme la pensée intégrale/systémique/complexe, la vie/l’écologie, le bonheur, l’empathie/la compassion, la culture de la paix/le partenariat, etc. Bien qu’ils semblent souvent déconnectés les uns des autres, ils se rapportent tous fondamentalement à ce nouveau paradigme de développement de l'(inter)être. Une politique de l’être a le potentiel d’unifier et de renforcer ce nouveau paradigme émergent et de le traduire en un tout nouveau programme de développement avec des réformes politiques concrètes à mettre en oeuvre dans de nombreux secteurs.

[1] Citation célèbre tirée du film italien Le Léopard.

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